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004_eternel.nv
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Il souleva péniblement ses paupières. Depuis quelque temps, le soleil les perçait de ses ardents rayons et cela l'incommodait fortement, inondant ses rétines d'une lumière rouge et brûlante. Il aurait voulu le détruire sur-le-champ mais il était encore faible. Après une longue mise au point, son environnement proche s'imposa à son cerveau par l'intermédiaire de ses yeux. Il vit tout d'abord un immense champ bleu en mouvement que les humains appelaient mer, puis une autre étendue, d'un bleu plus pâle et constellée de fines traînées blanches et vaporeuses. Le ciel et les nuages, pensa-t-il. Et enfin, une autre étendue monochrome mais celle-ci était jaune et de plus, il était allongé dessus. Le paysage était monotone pour autant qu'il pouvait en juger. Il n'y avait que trois couleurs – mais elles étaient nuancées à l'infini – et la terne toile qui ressemblait au tableau d'un artiste en manque d'inspiration était totalement plate et régulière. Il n'y avait aucune anfractuosité ou relief. Ses autres sens lui confirmèrent son analyse du paysage. Par le toucher, il sentit que le sable – tout le sol jaune était appelé ainsi – était rugueux et irrégulier ce qui provoquait un frottement gênant pour son confort. Grâce à son ouïe, il entendit le doux murmure du faible vent qui courait avec facétie entre les grains de sable et le sourd bruissement des vagues qui léchaient avidement la plage humide. Son odorat l'informa en outre de l'odeur de varech qui régnait en maître ici.
Il se releva enfin et observa son corps, à la recherche de la moindre blessure. Puis il réalisa la stupidité de sa conduite et cessa. En effet, qui aurait pu endommager son être ? Il était esprit pur et ne se matérialisait que pour se nourrir ou se battre. Il pivota sur lui-même et tourna le dos à l'océan pour faire face un autre paysage. De longues dunes sablonneuses et vallonnées s'étendaient d'un bout à l'autre de l'horizon. La végétation était extrêmement réduite et parsemée. Elle se réduisait d'ailleurs à quelques maigres branches verdâtres essaimées ici ou là par un étrange caprice de la nature.
Il aurait bien aimé savoir ce qu'il y avait de l'autre côté des monticules de sable qui bouchaient sa vue et entreprit donc de se mettre en marche quand il réalisa une nouvelle fois l'inintelligence de son attitude. N'était-il pas un Éternel ? Ne pouvait-il pas se téléporter au lieu de marcher comme un vulgaire mortel ? À peine avait-il formulé cette pensée qu'il se retrouva au sommet de la dune plus proche. Voilà qui convenait mieux à son statut divin, apprécia-t-il intérieurement. Ce qu'il vit devant lui contrastait fortement avec ses observations précédentes. Il y avait là une petite ville et les champs avoisinants. L'architecture lui semblait étrange mais c'était sûrement parce qu'il était lui-même étranger à la région. Les bâtiments étaient bas et trapus mais une fine tour ronde et élancée s'élevait sur chacun, donnant à la ville l'aspect d'un porc-épic.